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PRIE-SOUS-LÔ FIN AOÛT

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Cinq heures de l'après-midi. Julien a des frissons. Un léger vent frais se lève. Tout occupé à distribuer un fond de maïs à ses laitières, le jeune agriculteur ne voit pas Jérôme arriver. « Tu vas pouvoir faire la jonction avec la prochaine récolte ? »

La question du technico-commercial le fait sursauter. « Hé, tu m'as foutu la trouille. Préviens quand tu arrives. J'étais justement en train d'évaluer ce qu'il me restait ».

L'air soucieux de Julien ne rassure pas le technicien. Se saisissant d'un seau, le producteur étale à la volée dans toute l'auge le minéral qui vient complémenter le fourrage.

« Ah oui ! c'est vrai, j'arrive aussi au bout pour le minéral. C'est pour cela que tu viens d'ailleurs, non ? » Jérôme hoche de la tête tout en se disant que l'affaire allait encore être dure à discuter

Dans cette région auvergnate, touchée par la crise bovine à laquelle s'est rajouté le dernier épisode de sécheresse, le commerce est de plus en plus difficile. Bien qu'à la tête d'un troupeau de cinquante vaches laitières, Julien est aussi touché par la conjoncture avec son atelier de taurillons. Et il prend de plein fouet le manque d'herbe l'amenant à épuiser plus vite que prévu l'ensilage de maïs qui devait faire la passerelle avec le prochain.

« Tu en reprends pour combien de temps ? », demande Jérôme au jeune éleveur. Ce dernier reste pensif avant de répondre : « Je suis quasiment à vide là. Si je compte soixante kilos de minéral par vache pour toute la durée de lactation, il m'en faut bien trois tonnes, si je ne me trompe pas. Tu me fais un prix ? »

Muni de sa calculette, Jérôme jette un oeil dans son classeur et scrute rapidement la grille tarifaire du minéral. « Je te le propose à 2 250 euros », tout en observant la réaction de son interlocuteur. « Hein, tant que cela ? Allez, tu vas bien me faire une remise, si je te prends tout. »

Gêné, le technico-commercial peine à dire qu'il a déjà tapé dans le plus bas prix de sa grille. « Désolé, mais je suis déjà au plus bas. Si je te fais une remise en plus, je vais me faire incendier. » Saisissant une fourche, l'air contrarié, l'agriculteur se dirige vers la stabulation tout en lançant : « Tu peux t'asseoir sur la commande alors. »

Hélène Laurandel

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